WE GOT THE GOLDEN TICKETS

L[font=Georgia] orsque Aaron avait téléphoné à Harrison pour lui proposer d'aller au parc d'attraction, ce dernier avait failli répondre non. Le parc d'attraction était tout de même le lieux suprême de rencontre pour les adolescents de la ville et le jeune professeur de sport ne tenait pas à les croiser alors qu'il profitait pleinement de ses vacances. Néanmoins, c'était avec Aaron. Et n'importe quel plan avec Aaron méritait d'être vécu, ils parvenaient toujours à se foutre dans des situations pas possibles et à chaque fois c'était plein de rebondissements alors par conséquent, Harrison ne pouvait pas refuser de plus s'il disait non Aaron allait se retrouver avec deux places sur le bras. Alors il avait enfilé un t-shirt, un short de bonnes chaussures et était parti rejoindre Aaron chez lui afin qu'ils se rencontrent pour aller ensemble au parc.

Une fois arrivés là-bas, on pouvait dire que l'ambiance était bonne. La chaleur était difficilement supportable mais tout le monde était de bonne humeur à Winnipeg ce qui motivait Harisson à passer une bonne journée. De plus, aujourd'hui était une journée spéciale car le parc ouvrait un nouveau "monde" au public et seuls neufs chanceux seraient choisis. Pour pimenter la journée, les deux accolytes avaient décidé de participer au tirage au sort mais Harrison ne pensait pas vraiment qu'ils allaient être choisis, il gagnait rarement à ces jeux-là. Néanmoins pendant ce temps-là, les attractions étaient à eux... Ou presque. Les queues étaient interminables, ce qui déprimait Harrison. Aaron aussi semblait déçu : "J'avoue que ça se bouscule au portillon, j'avais oublié à quel point c'était galère les files d'attentes." Ils décidèrent donc d'aller se rafraîchir en attendant que les queues dégrossissent même si c'était sans aucun doute peine perdue. Ils commencèrent donc à regarder les gens défiler, une fois assis une bière dans la main. Il reconnut plusieurs têtes. "J'espère quand même que je vais pas croiser des gens que je connais, genre une de mes pestes d'élèves. T'imagines pas à quel point ces gamines sont chiantes, mec. Tu m'emmènes toujours dans les lieux stratégiques !"

 

« We got the golden tickets ! »

Welcome to the amusement park. Isaac levait les yeux vers l'arche d'entrée avec un grand sourire aux lèvres. Il avait bien fait de demander à sa sœur si elle voulait l'accompagner au parc d'attractions. Il savait que derrière cette proposition, il y voyait un moyen de renouer les liens depuis le léger différent qui les avait conduit à avoir des positions radicalement différentes. Mais, il avait caché ce prétexte en disant simplement qu'il voulait lui faire plaisir, elle qui était accro aux sensations fortes. Qui sait, peut-être arriverait-il à la faire changer d'avis à propos de leur désaccord ? À vrai dire, c'était plutôt le moyen de faire d'une pierre deux coups dans le sens où Isaac adorait profondément les parcs d'attractions. Il avait l'impression de retourner en enfance en voyant les stands de barbe à papa, de tirs à la carabines ou simples jeux de pêches. Et au loin, le traditionnel roller coaster qu'il tardait de réessayer. En plus, il avait bien choisi son jour car l'hôtesse d'accueil venait de leur indiquer qu'il devait absolument garder leur ticket car neuf chanceux allaient avoir l'honneur de visiter une nouvelle partie du parc. Il fallait absolument qu'il gagne. Les cinq derniers chiffres des tickets détermineraient les gagnants. Il priait pour que le numéro 30782 tombe lors des résultats. Ce n'était pas négociable.

Se tournant vers Camélia, il sauta sur place comme un gamin, ne sachant pas par où commencer. Certes, ils avaient toutes la journée mais déjà la foule nombreuse envahissait les queues des attractions et si il voulait avoir une chance de faire le roller coaster avant midi, il fallait qu'il se magne. « Je vais au roller coaster. Tu viens ? », dit-il à Camélia, avançant rapidement vers l'attraction sans pouvoir contenir son excitation, ni même attendre son aînée. Arrivés devant l'attraction, la borne indiquait déjà une vingtaine de minutes d'attente ce qui exaspéra Isaac, même si il s'engouffra sans attendre dans la queue de l'attraction phare de l'amusement park de Winnipeg. Sa sœur avait évidemment suivie. De toute façon, il suffisait de dire attractions aux sensations fortes pour que Camélia s'y jette immédiatement. Ils avançaient petits pas par petits pas dans la file d'attente, effectuant des tours et détours comme si jamais il n'arriveraient au but, et pourtant, la fin approchait à vue d’œil. « À midi, on ira au truc du chapiteau là. Si tu gagnes, tu me passes ton ticket, ok ? ». Il voulait bien lui faire plaisir, mais jusqu'à un certain point. Hors de question qu'il laisse sa sœur visiter une partie du parc inconnu pendant qu'il ruminerait dans son coin, boudant de ne pas pouvoir y accéder. C'était lui le plus jeune de toute façon, pensa-t-il, comme si il s'agissait d'une explication suffisante.

Assise sur le canapé, lisant le dernier tome du Trône de fer, un petit bijou de fantasy, je relevais subitement la tête, en voyant Zac, penché vers moi, la tête blottie au creux de sa main, qui me fixait sans bouger. Me tournant vers lui sans un mot, je ne pouvais m'empêcher de rire en le voyant me regarder comme ça, me lançant ce fameux regard de séducteur qui savait ce qu'il voulait, et qui était prêt à tout pour faire craquer sa victime. Je connaissais ce regard, et le petit sourire qui allait avec, qui ne pouvait signifier que deux choses. Il avait quelque chose à se faire pardonner ou à demander.

« -Je peux t'aider Zac? » demandais-je d'une voix amusée en posant mon livre pour le regarder.

Une sortie au parc d'attraction, juste entre frère et sœur...pourquoi pas. Depuis qu'il était revenu, reprendre nos marques avait été difficile, et notre relation était à des années lumières de celle que nous avions avant, lorsque nous étions proches au point de pouvoir tout se dire. Aujourd'hui, il m'arrivait d'avoir toujours l'impression qu'il n'était qu'un étranger dans la maison, un touriste de passage, continuellement sur le point de refaire son sac pour reprendre la route. Après tout, il avait raison, cette journée serait peut-être l'occasion pour nous de repartir sur de bonne bases, de rattraper le temps perdu. Si bien que tôt le lendemain matin, vêtue d'un short noir, d'une paire de spartiates et d'un haut légèrement rosé, je vissais mes lunettes sur mon nez, attrapais mon sac à main avant de crier à Zac qu'il était l'heure de partir. Il était tôt encore, il n'était même pas dix heures à vrai dire, mais si nous voulions profiter à fond de cette journée fraternelle, autant s'y mettre dès le matin. J'avais pris le volant, malgré le fait qu'il râle, et nous partions pour cette journée de sensations fortes.

Voiture garée, je fermais celle-ci, puis sac à dos sur les épaules, je regardais les différentes attractions, des étoiles dans les yeux, contente de pouvoir passer une journée dans le parc. Achetant les billets, j'en tendais un à mon frère, puis faisais la file avec lui, un large sourire sur les lèvres. Et à peine les billets déchirés par un ouvreur, je laissais ma bonne humeur exploser, entraînant mon frère à ma suite :

« -Et c'est parti !! » dis-je en riant, l'emmenant déjà dans la file d'un manège.

Le Roaller Coaster, rien que le nom promettait monts et merveilles, et si on en croyait la file qui s'était déjà formée devant le manège, aucun doute qu'il devait être l'un des plus aimés du site. Me tournant vers Zac, je ne pouvais que me contenter d'un large sourire, surexcitée, me sentant comme une gamine sur le point d'entrer dans un magasin de poupées.

 

« We got the golden tickets ! »

Mortel. Le roller coaster était aussi mortel que dans ses souvenirs. Une pure bombe. L'éclate totale. Quelques secondes de sensations fortes et de tournis qui valait bien les vingt-trente minutes d'attente. Ah, son cœur battait encore à cent à l'heure et il ne pouvait pas enlever le large sourire qui trônait dorénavant sur son visage. Isaac était prêt à le refaire mais dû se rendre à l'évidence en voyant la longue file qui s'étendait devant l'attraction, avec le panneau 1h30 d'attente. C'était dépitant. À croire que tout Winnipeg s'était donné rendez-vous ici. Impossible de refaire l'attraction si il voulait se rendre à midi vers le chapiteau pour l'annonce des tickets gagnants. Il était déjà 10h40, il lui restait donc qu'une petite heure avant la grande révélation qui ferait de ce jour le plus beau jour du mois, ou bien le pire. « Hé Lia, on fait quoi là ? Han viens, on va dans la maison hantée !!! », dit-il en voyant la vieille baraque surplombée la colline artificiel, se retenant de courir pour éviter que trop de gens ne passent devant lui dans la célèbre maison de l'horreur. Isaac était le genre de gamin à lâcher ses parents pour arriver au plus vite dans une attraction, enfin sauf qu'il n'était plus un gamin et qu'il n'avait plus de parents, seulement une grande sœur qui rigolait en voyant son excitation.

Quinze minutes de queues, c'était long. Surtout lorsque il y avait deux gosses qui pleuraient devant eux, en disant qu'ils ne voulaient pas entrer dans la maison hantée, et qui criaient qu'ils voulaient y entrer quand leur mère leur disait qu'ils allaient quitter la queue. Faites des gosses qu'ils disaient. Enfin, Isaac chassa cette pensée rapidement en se remémorant qu'il en avait bien un lui, et qu'il ne l’emmènerait sans doute jamais dans the amusement park. Faudrait déjà qu'il le rencontre et qu'il l'assume pour ça. Finalement, après d'autres cris, pleurs, et promesses de glaces à la sortie de la maison, Isaac, sa sœur, et malheureusement ces gamins et leur mère, entrèrent dans la maison hantée par une jeune mariée poignardée le jour de son mariage par son mari ou une histoire de ce goût-là. Isaac ne se rappelait plus si il y avait des monstres en prime, à moins que l'idée du mariage témoignait déjà bien assez de l'horreur que cela signifiait. « Putain, on se tape les gosses insupportables là. », murmura-t-il à sa sœur en rentrant dans une assez large pièce pour contenir une vingtaine de personnes avant d'adresser un sourire hypocrite à la mère qui le regardait suspicieusement. Il laissa sa sœur s'installer dans l'espèce de wagon-fantôme-monstrequifaitpaspeur-origineinconnue avant de s'asseoir à côté d'elle. « Tu m'achètes un glace aussi après avant qu'on aille au chapiteau ? », dit-il avec son visage enfantin, ses yeux rieurs et son sourire charmeur en sachant pertinemment que sa sœur ne lui refuserait rien.

Attendre était pénible, surtout lorsqu'on voyait les personnes qui avaient déjà la chance de faire l'attraction crier de plaisir dans les wagons qui enchaînaient les loopings. Il nous fallu donc patienter de longues minutes avant que notre tour n'arrive enfin, et c'est comme des gamins que Zac et moi nous installions finalement dans l'un des wagonnets, excités comme des puces. Les barrières se refermèrent sur nos tailles, alors que le manège se mettait en marche, lentement d'abord, puis avec de plus en plus de vitesse. Mes cheveux volaient de façon désordonnés autour de ma tête, alors que mes cris se mêlaient à ceux des autres participants, tandis que nous abordions la première descente.

L'attraction dura moins d'une minute, une durée tellement dérisoire en comparaison de ce que nous avions dû attendre, mais c'est pourtant un large sourire aux lèvres que nous allions vers la prochaine attraction. Zac nous entraîna vers la maison hantée, et je l'y suivais sans protester, ravie de pouvoir nous coller quelques frissons avant la suite de la journée. Là aussi, comme dans tout le reste du parc à mon avis, il nous fallait attendre patiemment notre tour, puisqu'un petit groupe se tenait devant nous. Parmi eux, deux gamins qui mettaient les nerfs de leur mère à rude épreuve, et visiblement ceux de mon frère également. C'est avec eux que avions finalement rejoint le manège, nous installant une nouvelle fois dans un wagon, dans une ambiance noire un peu glauque.

Je riais à la remarque ronchonne de mon frère, ne laissant rien entacher ma gaieté, alors que le wagon s'ébranlait et se mettait en route, nous emmenant au cœur de la maison hantée. La mère des bambins s'était installée devant ses deux monstres, alors que ceux-ci se blottissaient l'un contre l'autre, tandis que monstres, zombies et autres fantômes surgissaient de tous les côtés pour nous effrayer. C'était malgré tout amusant, et je passais un bon moment aux côtés de Zac, riant de bon cœur avec lui aux nombreux sursauts que j'eus, me secouant dans tous les sens pour échapper aux mains, cheveux et autres objets qui nous frôlaient de temps à autre.

En sortant, nous n'avions pu retenir nos fous rires en voyant les traits blêmes des deux gamins, alors que leur mère leur rabâchait les oreilles à coup de « je vous l'avais bien dit. » Quant à nous, nous nous dirigions désormais vers l'un des marchands de nourriture ambulant, Zac se commandant une glace, alors que j'achetais quelques bonbons, m'empressant d'en mettre un dans ma bouche.

« -Hum, regarde ! Y'a pas trop de monde aux chaises volantes ! On aura le temps de les faire avant d'aller au chapiteau ! Allez, viens !» dis-je enjouée, en le tirant déjà par le bras alors qu'il semblait obnubilé par sa glace.

 

« We got the golden tickets ! »

Malgré la présence des gamins, rien ne pouvait entacher la bonne humeur constante d'Isaac. Il avait d'ailleurs décider de les ignorer, eux qui s'étaient réfugiés sous les jupes de leur mère, incapable de supporter la moindre petite frousse. Des futurs losers ces gosses là, pensa-il avant de sursauter et de lâcher un petit cri strident lorsqu'il sentit une main lui toucher le haut de sa nuque. Camélia était morte de rire évidemment. « Arrêtes de te moquer. », dit-il d'une voix faussement vexé avant d'éclater de rire avec elle. Il l'avait bien cherché. À critiquer sans cesse les enfants du wagon précédent, il avait été puni. Lui et sa sœur eut leur dose de fous rire en comptant les nombreux sursauts de Camélia sans parler ceux d'Isaac, et leur maigres tentatives pour échapper aux indésirables momies, montres, fantômes et zombies qui les attaquaient chacun leur tour. Le jeune homme était d'autant plus fier de lui parce qu'il avait réussi à effrayer Camélia en glissant sa main de l'autre côté de son épaule pour la toucher du bout des doigts alors qu'elle s'agitait dans tous les sens, en pensant certainement à une bête ou à quelque chose du même acabit. Lorsqu'elle vit que c'était Isaac, elle soupira et le poussa gentiment alors qu'il était plié de rire, imitant les secousses de peur de sa sœur et qu'elle se vengeait en lui donnant des coups. C'était tout sourire qu'Isaac sortit de la maison de la terreur. Les pauvres gamins qui étaient devant eux avaient le visage livide et en jetant un coup d’œil à Camélia, il ne put s'empêcher de joindre son rire au sien.

Ils les dépassèrent en se rendant vers un petit chariot de friandises où sa sœur lui paya une glace au citron avant de s'acheter des bonbons pour elle-même. Isaac comptait bien lui en piquer dès qu'il aurait fini sa glace. Ils flânèrent quelques minutes, marchant le long des attractions quand Camélia s'exclama qu'elle voulait aller aux chaises volantes parce qu'il n'y avait presque personne. « Attends, je finis ma glace. ». Il avait à peine eut le temps de finir sa phrase que Camélia l'avait attrapé par le bras, en le tirant vers l'attraction sans lui laisser le choix. Ce qu'elle pouvait être têtue. Effectivement, ils n'avaient pas à faire la queue et Isaac dut finir sa glace en vitesse, se glaçant la langue et l’œsophage au passage, avec une grimace en prime. Un peu acide quand même cette glace au citron. Tant qu'il ne la vomissait pas après avoir fait les tours sur sa chaise volante, tout allait bien. Et heureusement pour lui, et pour les autres aussi, sa glace resta bien au fond de son estomac alors qu'il était balancé dans sa chaise, s'élevant de plus en plus du sol avant de redescendre une fois l'attraction terminée. « On devrait aller voir les résultats. », dit-il en sautillant sur place, piquant quelques bonbons dans le paquet de sa sœur, la prenant par le bras à son tour pour se rendre sur le lieu béni. Déjà une foule de personnes se pressaient, attendant avec impatience le tirage au sort, et Isaac poussa les gens pour s'approcher au plus près du chapiteau, entraînant sa sœur au passage avant de s'arrêter lorsqu'il jugea que leur position était acceptable. Il n'avait plus à attendre longtemps avant que les heureux élus ne soient nommés. Et il y avait intérêt pour qu'Isaac soit de le partie.